Petites fleurs et petites bêtes
Parce que la vie est partout, même au creux des vieilles pierres, et mérite qu'on la regarde.

Après plusieurs années d’abandon, les jolies petites fleurs, qui ne sont pour la plupart pas du tout locales, finissent par disparaître. Soit parce qu’elles ne sont tout simplement pas des vivaces, soit parce qu’elles ne sont pas heureusement envahissantes.
La nature reprend donc ses droits à Nouara, finis les bégonias et autres pétunias, seuls les tulipes et les iris résistent et se multiplient. Voilà revenues les petites fleurs des champs ; les perce-neige annonçant la fin toute proche de l’hiver ont été les premiers, puis sont venues les primevères jaunes et violettes, les pervenches et leurs corolles violettes aussi, et pour rester dans le ton, les violettes elles-mêmes. N’oublions pas bien-sûr les myosotis, les cardamines des prés qui émergeaient des hautes herbes, les jacinthes au loin. Les potentilles les ont suivis, qui ressemblent tant aux fraisiers, les fraisiers eux-mêmes qui tendaient leurs petites fleurs blanches pour se différencier, et les minuscules pétales bleutés de la doucette, version sauvage de la mâche. Les compagnons nous accompagnaient bientôt en bouquets roses ou blancs.


Les pois de senteurs sauvages ont déplié leurs tiges pour se parer de merveilleuses fleurs rose vif. La reine des prés devant le moulin des Vernières attendait patiemment l’été pour voir flotter ses grappes duveteuses au gré du vent, ses racines plongeant dans la terre humide du bord de bief.

Les rosiers après le nettoyage des premiers travaux tentaient de nouveau leur chance. De vieilles roses ont survécu ici, à surveiller. À surveiller aussi les vieilles vignes qui produisent à l’automne un raisin à se damner !
Plus discrètes, les fougères et mousses de toute sorte abondent au sol ou sur les murs. Les crosses d’évêques se sont déroulées peu à peu, tandis que les capillaires transformaient les murs en parois végétalisées. Tout un monde là encore, fréquentés par les mêmes qu’au sol, mais miniaturisés.

Autour du torrent, les saules avaient depuis longtemps perdu leurs chatons, prélude aux verts tendres des frondaisons toutes neuves. Les pieds dans l’eau, de grandes herbes et du cresson flottaient au fil des courants, tandis que de belles touffes de boutons d’argent les observaient de la berge.


C’était le printemps à Nouara, un enchantement discret avant l’exubérance toute proche de l’été.